Trab. Estrasburgo
Accompagner dans la folie, ni plus ni moins.
« Peut-être apparaîtra-t-il que les malades, dans ce cas, ne sont pas des malades ordinaires, les non-médecins pas absolument des « profanes », et les médecins pas tout à fait ce qu’on peut attendre de médecins et sur quoi ils basent leurs prétentions ». Sigmund Freud, “La psychanalyse profane”
Lorsque nous avons réfléchi au titre du « dispositif de la rampa », nous l’avons fait en pensant à la définition que Giorgio Agamben, l’un des philosophes qui nous accompagnent, emprunte à Foucault : « … un ensemble résolument hétérogène comportant des discours, des institutions, des aménagements architecturaux, des décisions réglementaires, des lois, des mesures administratives, des énoncés scientifiques, des propositions philosophiques, morales, philanthropiques ; bref, du dit aussi bien que du non-dit. Le dispositif lui-même, c’est le réseau qu’on peut établir entre ces éléments. » Et il poursuit : « Le dispositif a donc une fonction stratégique dominante … Le dispositif, donc, est toujours inscrit dans un jeu de pouvoir. »
Cette définition présente l’avantage de permettre une amplitude et une variété quant aux éléments qui forment le réseau du dispositif, elle permet d’inclure les éléments informels et virtuels. Elle laisse également de la place aux multiples facettes du dispositif et à leur caractère hétérogène. Et sa grande qualité est de poser d’entrée la question du pouvoir et celle du jeu de pouvoir dans lequel nous sommes plongés.
Mais c’est une définition très présomptueuse. Elle est trompeuse en ce qu’elle nous laisse penser que nous faisons partie d’une stratégie et que nous avons réussi à rester en dehors du pouvoir psychiatrique et à éviter de faire partie de la fonction psy.
Non, nous souhaitons préciser rapidement que notre dispositif est plutôt précaire, fragile, et que nous sommes plutôt dans une position de tentative de « survie à l’hôpital psychiatrique », « survivre à la folie institutionnelle », comme le dit Kenzaburo Oé.
La Rampa, l’équipe d’accompagnement des patients désinternés et les Ateliers artistico-communautaires forme la Zone d’accompagnement et d’initiatives communautaires de l’hôpital neuropsychiatrique de la Province de Cordoba.
La Rampa se trouve dans un endroit très particulier. C’est le dehors de l’intérieur de l’internat. C’est comme le balcon de l’internement. Le lieu qui permet aux patients internés de sortir, mais sans quitter l’internement. Ils peuvent monter pour écouter de la musique, boire du maté, arroser des plantes, lire un livre, ils font participer à l’une des activités excuse, le nom que l’on donne à nos ateliers. À la Rampa nous utilisons ces activités de la vie quotidienne comme excuse pour que des liens puissent se tisser entre patients, entre un patient et un accompagnant ou un infirmier. Nous créons des espaces pour essayer de parler de ce qui se passe, de cette expérience qu’est l’internement psychiatrique. À la Rampa, nous essayons de « donner lieu » aux nouveaux arrivants (comme un réfugié) (exercice de l’hospitalité) Esposito).
Mais il y a aussi un groupe de patients désinternés qui participent quotidiennement, certains pour s’impliquer dans une activité, d’autres seulement pour sortir de chez eux et créer un minimum de liens sociaux (idée de liberté de circulation, Jean Oury)
L’espace est coordonné par les infirmiers/accompagnants. Par hasard, ils sont également artistes, musiciens et plasticiens et, en tant qu’accompagnants, ils deviennent artisans du lien.
L’équipe est complétée par des accompagnants thérapeutiques en formation, qui disposent d’espaces de supervision, indispensable pour une pratique où l’on peut parler de l’expérience, du vécu dans le lien, des craintes, des relations avec l’équipe, des problèmes propres à l’institution.
C’est l’endroit où l’on peut parler de l’angoisse que génèrent certaines des situations avec lesquelles ils se connectent. L’impuissance dans laquelle se trouve parfois l’équipe. Quant à l’exclusion de la folie, on ajoute la marginalité sociale.
Les espaces de supervision sont notre façon d’accompagner les accompagnants et les infirmiers dans leur « rencontre » avec la folie. Malheureusement, c’est une pratique tombée en désuétude dans le reste de l’hôpital.
Nous disions que certains des patients montent spontanément ou à l’invitation des accompagnants pour une activité ponctuelle. D’autres sont orientés par leur thérapeute, qui peut demander qu’on les intègre dans un atelier, ou demander un accompagnement individuel.
Parfois, on nous demande d’accompagner un patient critique. Il peut s’agir d’un accompagnement qui commence dans la chambre d’isolement, encore pendant la phase aigüe de la crise. Ces cas sont pris en charge par des infirmiers accompagnants, dans un premier temps, puis un accompagnant prend le relais.
D’autres fois, le cas est critique, mais comme il s’agit d’un patient chronique, la question de l’hôpital même et de l’institutionnalisation, difficile à inverser, s’ajoute au problème du patient. Ces cas sont également pris en charge par l’infirmier/accompagnant.
Même si ce n’était pas l’objectif explicite, il se forme une communauté, étrange, thérapeutique (¿), avec une socialisation très particulière, mais dans laquelle se tisse un lien social précaire (mais cohérent).
Ces lieux de réhabilitation, héritiers de mouvements antipsychiatriques, permettent de conserver une certaine horizontalité dans le rapport accompagnant/patient, qui contraste avec l’internement et les autres secteurs hospitaliers.
L’hôpital dispose de quelques rares endroits où professionnels et patients peuvent se mêler, et ce sont les lieux de réhabilitation. Un endroit où la distance professionnel/patient se réduit, où la frontière sain/malade se brouille.
L’équipe d’accompagnement des patients désinternés
Les patients avec lesquels nous travaillons sont orientés par les équipes soignantes. Ce sont des hommes et des femmes majeur(e)s en général orientés quand « le cas » présente de nombreuses difficultés… cette équipe a précisément été créée pour “prendre en charge, aider” les “cas compliqués”, comme une sorte de soutien aux autres équipes. En général ce sont des patients qui sont internés depuis longtemps et qui, en raison des aléas de leurs vies, ont dû passer par de nombreuses institutions… qui ont eu plus ré-internements, et dont les liens familiaux, avec la communauté, se sont rompus au cours du temps. Ce qui implique que nous nous retrouvons avec des sujets passifs, porteurs d’un diagnostic…etc. Avec lesquels il faut pouvoir « prendre son temps », les prendre… pour que quelque chose se produise. (F.Davoine, Locura y Lazo Social)
Le Dispositif se compose de :
-l’admission
-des réunions hebdomadaires avec l’équipe
-l’articulation avec les équipes soignantes
-des réunions avec les accompagnants thérapeutiques
– Visites à domicile
– MAISON DE COHABITATION
Cette équipe a été créée pour répondre à ceux qui ne cadrent pas, aider les “patients” dont personne ne veut, qui dérangent, qui n’ont nulle part où aller. Et de ce fait, nous, qui travaillons avec eux, n’avions nulle part où aller non plus, et nous avons cherché un endroit. Et c’est ainsi qu’est né le groupe de lecture de “la Rampa” comme un lieu d’accueil… qui est comme un clin d’œil à ce que font Roland Lethier et Sonia Weber…pour pouvoir trouver des outils, en remettre en question certains, chercher, lire, trouver un endroit pour faire face à la frustration et à la détresse que l’on ressent dans ces institutions.
L’équipe des ateliers artistiques communautaires.
Ce groupe est constitué de 6 professionnels de l’hôpital et d’un bon nombre de bénévoles qui Font partie d’Abracadabra, une association civile qui soutient les ateliers. Les différents ateliers ont un coordinateur technique et un coordinateur thérapeutique. Il y a des ateliers de littérature, de chant, de musique, d’art plastique, de céramique, de chi Kong, de mandalas, de radio, de théâtre, de cinéma et audiovisuel, et bien d’autres.
Une autre facette essentielle du dispositif :
Le groupe de lectura de la Rampa. Depuis 6 ans, et à partir d’un conflit institutionnel qui impliquait l’internement de jeunes mineurs, nous avons commencé à nous réunir pour lire et discuter de textes liés à cette problématique. Au départ, seules les personnes directement touchées se réunissaient, puis nous avons invité des amis intéressés par cette problématique. La lecture s’est rapidement centrée sur les textes de Roland Lethier « stratégies de survie » et « arpenter l’inhabitable », et la bibliographie qu’il y citait.
Les questions autour de la « flaque nauséabonde » et de la « communauté de ceux qui n’ont pas de communauté » nous ont fait quitter la lecture d’auteurs psychanalystes et nous ont emmenés petit à petit vers la philosophie et la biopolitique, réalisant un décentrement bienvenu.
Cela nous a permis de nous rapprocher d’autres questionnements, d’autres visions, d’autres points de vue. D’un autre moyen de se poser la question du lien social. La lecture de Bataille, Blanco, Nietzsche, Imre Kertész, Derrida, Nancy, Deleuze, Foucault, Agamben, les rencontres avec Emanuel Biset, un philosophe qui a donné un séminaire sur la communauté, et que nous avons invité dans notre groupe à plusieurs reprises.
Plus tard François Jullien et ses « Cinq concepts proposés à la psychanalyse », « l’écart et l’entre », « les transformations silencieuses », et toujours Jean Allouch, Mayette Viltard et Lacan.
Le résultat, c’est un groupe hétérogène d’analystes qui travaillent dans différentes institutions et qui trouvent dans le groupe non seulement la possibilité de lire, de partager la lecture de textes difficiles à lire seul, mais également la possibilité de parler des pratiques. Certains de nos collègues travaillent dans des hôpitaux psychiatriques, d’autres dans des hôpitaux généraux, dans le public comme dans le privé. D’autres encore travaillent dans des centres de santé communautaires ou dans des équipes éducatives. Enfin, certains se consacrent aux pratiques privées. Nous partageons les difficultés que nous rencontrons à pratiquer la psychanalyse en institution.
C’est-à-dire que nous partageons les difficultés que la pratique analytique impose dans chacun de nos environnements. Nous formons également une communauté analytique particulière qui nous a permis de rallumer la flamme de l’analyse, dans des moments difficiles où l’institutionnel cherchait à nous paralyser. Je cite Percia : « l’hôpital psychiatrique nuit également à ceux qui y travaillent. Il détruit la volonté de savoir. Il ne met pas en valeur ceux qui font partie de l’institution. Sauf ceux qui arrivent avec l’illusion de penser (et qui appellent à l’aide les gens qui ne travaillent pas dans l’hôpital), les autres, nombreux, deviennent apathiques, réticents, indifférents aux idées. Comme si la pensée, entre les murs, était un luxe inutile, non nécessaire, l’excuse de ceux qui ne font rien. »
Nous pensons que ce dispositif, ce réseau, est ce qui va nous permettre, parfois, de contrer le pouvoir psychiatrique et la médicalisation.
Je souhaiterais partager les questionnements qui apparaissent dans notre pratique, celle de l’accompagnement de la folie. C’est ce que nous faisons à la Rampa, ateliers communautaires et équipe d’accompagnement des patients désinternés, à quelques différences près. L’espace d’accompagnement et les méthodes communautaires cherchent à remplacer la zone de réhabilitation, et nous nous trouvons dans cette transition.
J’aime à dire que nous travaillons dans un hôpital psychiatrique qui ne cesse d’essayer de se transformer, sans y arriver, mais sans cesser d’essayer malgré tout. Il existe donc des moments où se crée une véritable communauté thérapeutique dans certains groupes, qui alternent avec des moments où l’on se trouve dans un hôpital psychiatrique des plus communs, où la parole du fou n’a pas sa place, ou « Maria », ce personnage de Garcia Marquez « était seulement venue pour utiliser le téléphone », elle se retrouverait internée.* (Douze contes vagabonds)
Depuis que nous avons commencé à travailler à l’hôpital, nous faisons partie de ces groupes qui, à partir de l’antipsychiatrie ou de la psychanalyse, ou des groupes de travail, se sont opposé à la structure institutionnelle verticale, ou à la logique de l’hôpital psychiatrique, au modèle de l’hégémonie du médical, à la médicalisation. Cela signifie que nous faisons partie d’expériences et de dispositifs qui visent des alternatives à l’internement, mais qui sont en faveur de la transformation et non de la fermeture des hôpitaux. Nous dirions que nous sommes plus proches de Tosquelles qui disait « il faut soigner l’asile », que de Basaglia qui propose de les fermer.
Un analyste argentin, Marcelo Percia, qui a travaillé dans différents hôpitaux psychiatriques, et a coordonné différents ateliers littéraires propose, à la suite de Jean Oury, « qu’être psychanalyste dans les institutions, c’est savoir héberger une fin possible pour l’inespéré ».
L’accompagnement, quand il se produit dans le champ de la folie, implique un défi, car il s’agit souvent d’essayer de créer un lien avec une personne à la frontière du langage. Cet accompagnement s’effectue dans le cadre d’un travail collectif où, parfois, l’accompagnant peut jouer le rôle de secrétaire.
Est-il possible de trouver une façon d’être dans les institutions, et dans celle-ci en particulier ? Parce qu’on ne sait pas quoi faire… comment mettre en pratique des outils qui n’ont rien à voir avec la clinique mais qui évoluent dans un territoire politico-institutionnel. Et encore plus à cette époque de “transformation” dans laquelle nous nous trouvons. Il y aurait une coexistence inévitable entre la clinique et le politique.
Comment faire pour rester avec l’autre, en tant qu’autre? Comment supporter le dit et le non-dit mais qui se trouve dans le corps, dans les corps ? Où il n’y a aucune symbolisation possible ? Comment est-il possible de trouver et où chercher d’autres ressources…
En définitive, la question est liée à la façon d’être là, au mode d’accompagnement, que ce soit dans les cas où on a un sujet qui a été réduit au silence, qui n’a pas été écouté, qui a été uniquement classifié comme exclu parce qu’il est psychotique, débile mental, dépendant, etc. mais aussi dans les autres cas qui sont hors de tout, de tous? (comme les déssolés dont parlent R. Lethier et Sonia Weber).
– La présence, être là encore et toujours…… bien qu’il ne participe pas à la rencontre, qu’il ne se lève pas à l’heure prévue, bien qu’il dépense l’argent… pouvoir voir ce qu’il se passe… est-ce ce fait ou qu’y a-t-il derrière ? Dans les cas sur lesquels nous travaillons, on pourrait dire qu’il y a une absence d’autre (F.Davoine). Nous commençons alors à voir comment cette présence, avec ce cheminer ensemble, avec ce je suis de nouveau là, commence à construire quelque chose, un lien… il y a autre chose, et ce travail prend du temps… d’écoute du plus infime, d’écoute d’histoires dans le cadre d’une activité ou d’une routine… qu’y a-t-il derrière tout cela… laisser ce sujet nous guider, nous raconter parfois quand il arrive à se souvenir, et d’autres fois lui donner la possibilité d’inventer, d’essayer quelque chose plusieurs fois.
–Ce n’est pas possible de le faire seul…. Il faut que d’autres personnes accompagnent l’accompagnant, ou alternent de temps en temps… d’autre part cela permet de créer un lien, d’ouvrir le jeu, de faire circuler la nouveauté, la surprise, l’imprévu, l’invention…
–L’accompagnement au quotidien…..Être là au quotidien dans ce qu’une personne fait à partir du moment où elle se lève, qu’elle se lave ou non… qu’elle mange… qu’elle sorte de l’institution ou (ici) de la maison… sortir chercher une pension, aller au distributeur automatique, à la banque, etc… intervenir dans ces espaces…sortir de la logique du cabinet, du bureau avec les chaises, l’ordinateur, le stylos… il y a un plus… qui d’après ce que je comprends et ce que j’ai pu expérimenter, est lié à d’autres manifestations de l’humain, outre le langage (qui est l’aspect qui entrerait le plus en jeu dans la logique du cabinet, la logique du signifiant, essayer de trouver un sens… même si on tente souvent d’y échapper).
Le quotidien, ce que fait le corps, comment il se dirige, comment il bouge, la façon dont il entre en contact avec les choses… on pourrait dire que tout cela indique un certain niveau de relation du sujet avec le réel… ou peut-être la limite entre le réel et le symbolique.
C’est ainsi que parmi tous ces événements…toutes ces choses qui se passent au quotidien… chargées souvent d’horreur et d’angoisse…. On commence à observer et à voir comment, lorsqu’on permet quelque chose, on laisse un sujet croire, inventer, essayer… on le laisse… on lui « donne la liberté »… de choisir, de décider, même si nous ne sommes pas d’accord avec ce choix… nous sommes à côté…malgré tout ce que cela peut générer en nous (peurs, tensions, angoisses), il se passe quelque chose… et ça, on ne peut pas le savoir à l’avance…
Dans une interview donnée lors d’un voyage au Brésil, Lethier soulève l’élément suivant :
Il dit que nous savons : … « que la folie n’est pas une maladie, et que nous ne devons donc pas nous précipiter pour la soigner. Il faut plutôt l’accompagner. Il est nécessaire de la laisser s’épanouir, donner ses raisons, se déploie. »
Il va parcourir le virage effectué par la psychanalyse à partir de L’une bévue, et la réponse aux critiques de Foucault, la séparation de la psychiatrie, de la psychologie.
Il va proposer d’arrêter de parler de névrose et de psychose, et de pouvoir dire les choses de manière différente que celle employée par la psychiatrie. Il va proposer le concept « d’inhabitable ». Il dira que la folie serait une façon « d’habiter » les problèmes subjectifs.
À partir des questionnements de “Perturbation dans pernépsy”, de Jean Allouch et de “Eclats de clinique” de Bernard Casanova, le monument de la monographie, de la psychopathologie psychanalytique s’écroule. On ne peut plus continuer de parler de névrose et de psychose comme termes de structure clinique. On pourra peut-être utiliser ces termes, mais de façon différente et en tout cas plus comme des catégories diagnostiques. Par exemple comme la façon dont Fernand Deligny utilise l’expression « façon d’être autiste ». Il y a alors différentes façons d’être dans le langage, mais il ne s’agirait plus de les diagnostiquer. Il va dire : « non pas dire que quelqu’un est autiste, mais parler plutôt de la dimension autistique de l’être humain ». « Le travail avec des autistes devient une enquête sur l’autiste” (l’arachnéen)
Deligny va citer Deleuze et Guattari et “l’anti-Œdipe” pour dire que la schizophrénie est un processus universel.
Rappelons-nous qu’Harry Sullivan, sauvé de l’oubli par Françoise Davoine a écrit « La schizophrénie, un processus humain ».
Gaetano Benedetti dans « Psychothérapie de la schizophrénie : existence et transfert » soulevait le « mode de vie schizophrénique », « la schizophrénie comme existence négative ». (Falta otra cita)
Mais, en réalité, cela fait longtemps que nous “pilotons”, que nous retournons la question de la tension entre la folie et la maladie mentale, qui, comme le dit Giles Deleuze dans Trois problèmes de groupe, « ce sont les maladies mentales qui disparaîtront au profit de quelque chose que nous n’avons pas encore compris de la folie ». Dans ce même article, il se demande : « viendra-t-il un temps où l’on étudiera avec le même sérieux, la même rigueur, les définitions de Dieu du président Schreber ou d’Antonin Artaud, que celles de Descartes ou de Malebranche ? »
Et on peut dire que ce jour est arrivé, car Jean Allouch a publié il y a quelques années : « Schreber Théologien, l’ingérence divine ll », où le texte de Schreber est lu comme un traité de théologie et non pas en donnant lieu à un commentaire psychiatrique ou psychanalytique.
C’est pourquoi j’aime le terme accompagner, il est vrai que l’on fait le pari que quelque chose se passe via ce lien, concrètement, que quelque chose d’autre puisse se produire (que la répétition) mais changer, ce n’est pas guérir. Il est très difficile de sortir des catégories sain/malade.
Quand nous travaillons avec le lien, nous sentons que nous pratiquons l’art de l’accompagnement. Marcelo Percia se demande : « que signifie accompagner ?” Que signifier donner refuge à l’autre ?” comment offrir un accueil à quelqu’un qui souhaite se déshabiter, qui sort de lui-même comme s’il se jetait du dixième étage ou qui fuit de sa propre bouche le corps en flammes ? »
Il faut être prudent avec la blessure présumée, et parfois on parle de corriger des nœuds ?? cas de Joyce
Parviendra-t-on à éviter la médicalisation, à éviter la fonction psy ? Nous croyons que la clé de “être analyste” dans l’institution tel que le soulève Marcelo Percia, un analyste qui a coordonné plusieurs ateliers littéraires dans plusieurs hôpitaux psychiatriques d’Argentine, passe par là.
Il y a une vieille question à laquelle nous souhaitons retourner parce qu’elle est liée à notre pratique. Elle est en lien avec ce “commun”, avec ce commun que l’on trouve dans l’accompagnement, dans les moments de transfert psychotique, dans le travail collectif. À un moment donné, il a été relié à la “folie à deux”, à la “complémentarité vitale ». Déjà à ce moment-là, Léthier disait que quand on entre dans le champ du transfert psychotique, il n’y a pas de psy.
Cela donne une piste ou une position de secrétaire, ou la fonction psy. Et dire, parole, analyse, supervision
Quand on travaille dans des institutions psychiatriques, dans des hôpitaux généraux, avec des pratiques en tension permanente, en tension entre la psychanalyse/l’institution, tension entre folie et maladie mentale, tension entre sciences et art, tension entre analyse et clinique.
Conclure en préparant la défense avec les philosophes et les artistes poètes.
Alejandra Arizo, Roxana Serafini, Gustavo Rivarola